vendredi 27 septembre 2013

Bouillon, vous avez dit bouillon…

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Vous avez dû remarquer sur nos affiches présentant l‘entretien avec Vassilis Alexakis, la mention « en partenariat avec Le Bouillon, Centre Culturel de l’Université d’Orléans ».


Qui est donc ce Bouillon ? Il est situé à La Source pas très loin de la résurgence du Loiret, dont la source principale est appelée le Bouillon.






Mais celui qui nous intéresse est un bâtiment installé sur le campus d’Orléans, à l’arrière de la faculté des Lettres. C’est le Centre Culturel de l’Université d’Orléans. Il réunit un théâtre (160 places), pouvant accueillir des spectacles de théâtre, de danse, des concerts de musique classique, de musique contemporaine, des projections cinéma, des rencontres littéraires et une salle de concert (180 places). Ouvert depuis le 29 septembre 2011, ce Centre accueille les étudiants et les personnels du l’Université. Les spectacles qu’il propose sont aussi ouverts aux gens de l’extérieur, donc à nous tous (dans la limite des places disponibles).



Ainsi, la saison dernière, le grand musicien baroque, Jordi Savall, s’y est produit (4/2/2013). Certains budistes ont assisté, le 10 avril 2012, à une rencontre avec Julia Kristeva, animée par Yasmin Hoffmann qui, notons-le, a quitté les bords de Loire pour enseigner dorénavant à l’université de Montpellier, bonne chance Yasmin pour la suite de ta carrière…



Durant le premier trimestre universitaire, si l’on excepte les musiques appréciées des étudiants mais un peu éloignées de mes pôles d’intérêt, j’ai relevé parmi les propositions du Bouillon :



du théâtre : Une vie de pantin (15 oct.) par Bath’art, l’association théâtrale étudiante de l’université d’Orléans et Une vie d’opérette (26/11), un spectacle musical,



une conférence-débatRévolte des étudiants chiliens, (22/10) à l’occasion du 40e anniversaire de du coup d’état et de la mort de Salvatore Allende



des projections :

  • Le Ruban blanc film de Michael Haneke (5/11)
  • The Perfect American, un opéra de Philip Glass sur la fin de vie de Walt Disney (12/11),
  • JFK, film d’Olivier Stone (27/11), précédé d’une rencontre avec l‘historien Thierry Lentz
  • Tannhaüser (10/12) de Richard Wagner


De la danse :

  • Versus 8.4, de Guillaume Bertrand, Cie 13 Quai
  • Sad Songs, de Thierry Baë, Cie Traits de ciel

Vous pouvez prendre connaissance de l’ensemble des activités prévues en vous rendant sur le site web du Bouillon. Vous pouvez aussi télécharger la brochure trimestrielle du Bouillon : c'est par ici.
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dimanche 22 septembre 2013

Catherine Martin-Zay, officier de l'ordre des Arts et des Lettres.

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Il est 15 heures. Le vendredi 5 septembre 2013 s’étire dans la chaleur moite d’un après-midi saturé de soleil. Nous gagnons le centre ville d’Orléans. Au débouché de la place de Gaulle s’ouvre la rue Notre-Dame de Recouvrance qui descend doucement vers la Loire, belle flâneuse que la ville porte en écharpe fluide et douce.

Quelques badauds, dont nous sommes, tournent autour de la vitrine claire du numéro 57, comme en attente d’un évènement. C’est une adresse bien connue des Orléanais, de ceux qui aiment retrouver l’un des pôles culturels qu’offre la ville ligérienne. Il attire les amoureux de la littérature et des échanges, en toute liberté de parole.  

C’est au rez-de chaussée de cet immeuble, que Catherine Martin-Zay, choisit, en 1964, d’ouvrir une librairie qu’elle appela « Les Temps modernes » en hommage à la revue fondée par Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir, ces « monuments » des Lettres, toujours très visités. 

Dans ce lieu aussi lumineux qu’exigu, les livres montent au plafond, se nichent dans le moindre recoin. Ils s’imposent aux regards, nous toisent du haut de leurs rayonnages ou se prêtent simplement à la caresse d’une main amicale et curieuse. 

Depuis 50 ans « Jubilé ! Jubilons ! » Catherine, de longue date adhérente de notre association, fait vivre sa librairie, avec l’exigence, l’énergie et l’allant de qui connaît parfaitement son domaine auquel elle prête son beau visage-palimpseste, ouvragé par le temps, sculpteur de nos passions.

L’effervescence se propage dans l’allée centrale bientôt surpeuplée, porte ouverte sous l’arcade ombrageant  les amis et clients qui ceinturent en grand nombre, les vitrines du magasin. Journée particulière pour notre amie libraire. Une mise à l’honneur, un jour de gloire couronné des lauriers de la République ! puisque Catherine Martin-Zay reçoit aujourd’hui les insignes d’officier des Arts et des Lettres, des mains de la ministre de la Culture Aurélie Filippetti.




À l’heure dite, la haute silhouette sportive de la très médiatique ministre, franchit le seuil, se fraye un passage, cernée de toutes parts par les VIP, personnalités politiques et culturelles de la ville d’Orléans. Très à l’aise au cœur de ce public de lecteurs qui pourraient être les siens car elle est romancière en plus de ses fonctions ministérielles.      

Le silence s’est fait pendant que se déroulent les phrases d’un discours de circonstance fort bien ordonnancé. La sonorisation prévue porte la parole in et off de l’espace librairie bruissant de vie. « L’œil écoute »


Premier hommage à Jean Zay, le père de Catherine. Ministre de l’Éducation nationale et des Beaux-Arts, il fit beaucoup pour diffuser la culture, pour  tendre vers ce qu’il appelait « son  idéal démocratique ». Fidèle à la tradition paternelle, sa fille concrétisa  ses idées avec l’ouverture de la première librairie indépendante d’Orléans, forte de son identité particulière. Place aux livres de « belle et grande littérature », « patrimoine de la nation de l’esprit » rappelle Mme la ministre, citant Alfred de Vigny. Ses propos soulignent le rôle de passeur d’intelligence qu’a joué Catherine, pendant 50 ans, attentive à toute forme de nouveauté littéraire quand celle-ci sait allier l’exigence d’une pensée avec l’art du styliste. Puis l’oratrice salue la ferveur de son engagement militant au service des Lettres et des Arts, avant de clore son allocution.



Au prix de quelques contorsions, je peux apercevoir Catherine que la République a choisi d’honorer en ce jour de septembre. Vêtue de blanc, telle une vestale antique, elle nous semble la gardienne d’un Temple, vouée au dieu de la littérature qu’elle sert toujours avec la flamme de sa conviction. Je la vois qui pose en toute simplicité, fine statuette de Tanagra que la Messagère culturelle épingle bientôt de la médaille d’officier des Arts et des Lettres. Bravo !

Catherine alors s’anime pour répondre au discours ministériel. Sa voix s’élève maintenant dans un silence quasi religieux. L’émotion gagne certains d’entre nous qui la connaissons bien. Remerciements chaleureux à tous ceux qui l’ont aidée dans sa mission de service public. Rappel du passé, souvenirs de la petite enfance à Riom où elle retrouvait fugitivement son père apprenant, comme lui, à lutter contre l’adversité, telle la Chèvre de M Seguin, qu’elle fait surgir près d’elle, le temps d’évoquer son combat acharné de résistante aux forces du mal. Nous la suivons dans le déroulement des étapes de sa vie ; son arrivée à Orléans, la découverte du prestigieux passé de la ville où elle s’insère et prend place en donnant aux Livres une maison à vivre et «commercer» avec la clientèle qu’elle fidélise grâce à des activités ciblées qui animent sa librairie « Bouillon de culture ». J’aperçois, près d’elle, sa sœur Hélène, elle-même témoin de son temps avec la fondation du CERCIL, en ville d’Orléans. 

Catherine évoque ces temps de rencontres inoubliables avec les auteurs qu’elle convie régulièrement dans son pré-carré du partage, tant hier qu’aujourd’hui, puis elle dévide un chapelet de noms d’écrivains, tous « ces travailleurs intellectuels » dont les ouvrages, les photos, les posters vivent sous nos yeux, façonnant la personnalité de cette librairie « atypique » où le livre n’est pas simple gadget soumis aux modes mais source de vie.

Avant de clore son discours, Catherine présente la nouvelle directrice de la  maison, sa fille Sophie épanouie auprès d’elle, déjà projetée dans une galaxie nouvelle toujours peuplée d'ouvrages en quête de lecteurs. Fidélité ! Beauté de la transmission familiale !  

Il me plaît de retrouver le timbre de sa voix, la scansion douce et nette de son phrasé. Nous sommes suspendus à ses lèvres, heureux de l’hommage rendu à « notre Dame Catherine » fiers d’être de ceux qui hantent sa librairie, vont, viennent, discutent, montent les escaliers pour envahir l’espace d’en-haut, rempli de lumière. Je l’imagine au cœur de son activité quasi hebdomadaire. 

Catherine devient  l’« Arthenice des Temps modernes », le jour où elle reçoit l’invité(e) du jeudi, dans sa « ruelle » du premier étage. Les amateurs ont ainsi rendez-vous avec les auteurs, poètes et romanciers, peintres, artistes, théoriciens et philosophes que l’on rencontre « sur le vif » le temps d’un rendez-vous qu’on savoure avec le plaisir gourmand des amoureux de la vie dans tous ses états.   

Chacun prend place cahin-caha dans un joyeux fouillis de tabourets et de chaises ( très demandées) dans le brouhaha des « flashs « de conversations qui préludent à la présentation de la personne invitée. Nous aimons ces heures lumineuses, les échanges, les controverses, les feux de l’esprit qui étincellent autour d’une lecture qui nous échauffe la tête et le coeur. On se dit qu’on a retrouvé le temps perdu à je ne sais quoi et «recouvré » la santé mentale avec l’art de la conversation. L’on se sent accueilli dans cette maison du 57 rue de la Recouvrance la bien nommée car elle soigne notre mal de vivre.




Pour toutes ces raisons, pour la passion vécue,
Chère Catherine , 
« Grâce vous soit rendue ».
Écouter la cérémonie
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